SAMEDI POLITIQUE : Que faire exactement quand on fait la politique ( Acte 2 )? l'occupation de l'espace politique décortiquée par l'analyste Allah KOUAME

Landry KOUAME Sam 20 Août 2022 grand-genre [26 articles] 1478 Vue(s)
Le Journaliste Allah KOUAME s'intéresse à l'occupation politique dans cette analyse
Pour paraphraser le politologue français Yves Schemeil, faire de la politique soulève un certain nombre de problèmes à savoir : comment appeler ce qu'on fait ? Que faire exactement quand on fait de la politique ? Le samedi 13 août 2022, nous nous sommes atellés à définir le terme '' politique '' afin que celui qui vient à la politique sache ce à quoi il s'engage. Aujourd'hui, samedi 20 août 2022, nous allons égrener les différents domaines de la science politique. Puis donner quelques orientations pour être un politicien fréquentable qui sait quoi faire en venant à la politique.

 

 1) Les domaines de la science politique

 

La science politique couvre plusieurs domaines. Les spécialistes de la discipline les regroupent essentiellement en 4 grands domaines que nous allons découvrir synoptiquement. 

 

a) La théorie politique

 

Elle concerne l'étude et l'affinement des concepts transversaux rattachés à la politique tels que la société, la cité, la nation,  l'État, la République, la souveraineté, le pouvoir, la démocratie, la monarchie, le citoyen, le national, la nationalité. La liste est longue. Elle s'attache à formuler des théories globales de la pensée politique. C'est pourquoi l'on associe à la théorie politique l'histoire des idées politiques. 

 

b) La sociologie politique

 

C'est l'étude monographique ou comparative des acteurs de la vie politique à savoir les institutions, les partis, les groupes d'intérêts, le personnel politique, les forces sociales. C'est aussi l'analyse des élections, des processus de socialisation, des stratégies de communication et d'action collective. C'est enfin l'étude des modes de construction des idéologies.

 

c) Gouvernance et action publique

 

Elle s'intéresse aux processus décisionnels des États, à la formulation, à l'exécution et à l'évaluation des politiques publiques. L'on parle de bonne ou de mauvaise gouvernance dans la gestion au quotidien de l'État. Ce pan s'applique également aux entreprises et organisations internationales. Ici il s'agit des décisions prises par ceux qui exercent les fonctions de gouvernement. 

 

d) Relations internationales

 

Les Relations internationales (RI) s'entendent a priori comme l'étude des rapports interétatiques pacifiques ou belliqueux. Aujourd'hui ces rapports transcendent le cadre des États pour prendre en compte les activités des organisations et forces transnationales. Les RI entretiennent des rapports étroits avec le droit international.

 

Il est bon pour qui veut faire de la politique d'avoir une vue synoptique de ces grands domaines. Mais que faire exactement quand on s'engage en politique?

 

 

2) Que faire quand on fait de la politique

 

S'il y a des politiques ou des politiciens nés, généralement la quasi totalité des hommes et femmes politiques Ivoiriens confessent s'être retrouvés à la politique '' par hasard'', '' par effraction'' , '' comme ça''. Qu'il s'agisse des leaders ou de simples militants. Pourtant il est bon d'observer un nombre d'orientations même quand on se retrouve par un concours de circonstances en politique. Tout commence par la formation.

 

a) La formation 

 

La formation doit être la première des choses à privilégier lorsqu'on se retrouve dans une action, dans un métier. Comme le disait si bien Laurent Gbagbo '' La politique est un métier''. En politique, il est bon de privilégier la formation aussi bien pour les leaders que pour les militants. Lorsque vous, acteurs politiques à l'improviste, vous vous retrouvez en politique, prenez soin de savoir '' ce que c'est que la politique'', c'est-à-dire ce à quoi vous vous êtes engagés. Cela vous permettra de savoir la trilogie du mot '' politique'' dont nous avons parlés ainsi que des domaines embrassés par la science politique. Vous pourrez donc implémenter ces notions à vos militants ou sympathisants par la formation. Car tout passe par la formation. Comme on l'entend souvent au Pdci-Rda '' Un militant mal formé est dangereux pour lui-même mais aussi pour son parti politique''.  L'on comprend que les grands partis politiques en Côte d'Ivoire se soient tous engagés ces deux dernières années à la création d'instituts politiques ou d'écoles du parti rattachés à leurs appareils. Une chose est de créer des instituts, mais une autre est l'animation de ces structures, et une autre chose enfin est la qualité des animateurs de ses structures et du contenu dispensé. Dans l'ossature des partis, il existe des secrétariats à la formation qui ne font jamais de formation. Dans les sièges régionaux des partis la formation est reléguée aux calendes grecques. Pourtant la formation sur la notion de '' politique '', sur les '' domaines '' de la science politique, mais surtout sur le parti ou ses leaders permet de pacifier et faciliter l'implantation du parti par la connaissance de sa vision.

 

b) La vision

 

Un parti ou un acteur politique doit avoir de la vision. La vision c'est l'avenir prometteur que le parti ou le politique envisage pour ses concitoyens pour des lendemains meilleurs. Il faut que celle-ci soit originale. Alassane Ouattara promettait le vivre ensemble dans un contexte où des nationaux étaient exclus, privés de leur identité. Alors que Henri Konan Bédié parlait de préférence nationale avec l'ivoirité, puis des grands chantiers de l'éléphant d'Afrique. Quant à Laurent Gbagbo, il a préconisé l'alternance démocratique en Côte d'Ivoire avant de tomber dans la refondation de la Côte d'Ivoire et aujourd'hui dans le panafricanisme. Du vivre ensemble, Alassane Ouattara est à ce jour dans la Côte d'Ivoire émergente mais surtout dans une Côte d'Ivoire solidaire. Guillaume Soro promet une génération nouvelle des peuples solidaires. Cette vision pour être valable,  doit être une vision de paix, de développement, de  bien-être, de solidarité agissante, de partage, de progrès, de progrès pour tous et de bonheur pour chacun comme préconisé par Henri Konan Bédié, dans le bon ton du Général Guei Robert et le vivre ensemble d'Alassane Ouattara. 

Ce discours sur la vision doit être appuyé par certaines valeurs que nous venons de citer prônées par le leader politique. Le leader doit surtout incarner des valeurs.

 

c) Les valeurs du leader

 

Le leader politique bien formé, ayant une vision de son action doit tout faire pour incarner des valeurs. Au nombre de celles-ci le politique doit jouir d'un capital politique confiance. Le capital politique confiance, c'est ce qui fait qu'une collectivité, un groupe de personnes va accepter de suivre les orientations énoncées par le leader, va se plier aux efforts ou changements qui lui sont demandés. Une telle confiance se fonde sur 5 composantes. Nous parlerons ici d'une composante, les autres feront certainement l'objet d'un autre ''Samedi politique''. Il s'agit de la composante morale. Celle-ci se manifeste par l'idéologie soutenue avec constance et conviction par le politique ou par un crédo politique qu'il défend. Par exemple alors que le Pdci-Rda parti libéral est un parti de centre droit, le Rhdp prône un libéralisme à visage humain quand le FPI devenu Ppa-Ci avec le retour de Laurent Gbagbo de La Haye parle de socialisme et de panafricanisme.

Aujourd'hui Alassane Ouattara a ajouté la valeur travail et solidarité agissante à son action politique. De sorte qu'on l'appelle'' Madou Goudron''. Nombre de ses disciples l'ont suivi dans l'action. Qui ne se souvient des largesses du défunt Premier ministre Hamed Bakayoko ou de celles de l'actuel président de l'Assemblée nationale Adama Bictogo. À Bouaké par exemple, le ministre Amadou Koné, les députés Bema Fofana, Assahoré Konan Jacques, le maire Djibo Youssouf Nicolas, le député Dakuyo Paul, le maire Yao Kouassi Maurice dit Akpolai Kouadio sont réputés détenir le record Guinness pour leurs actions de  '' générosité'' et '' actions de développement'' dans la région. Il ne se passe pas de week end où l'une de ses personnalités ne mène une action au nom du Chef de l'État Alassane Ouattara dans sa localité. Qu'il s'agisse de dons de vivres, de non vivres, d'inauguration de ponts, de centres de santé. 

La composante morale fait donc aussi appel comme on vient de le démontrer aux qualités personnelles du leader à savoir l'exemplarité de son don de soi, de son comportement, sa réputation d'intégrité, sa droiture, son honnêteté, son altruisme et son ardeur au travail. Lors du meeting du Réseau des Amis de Bema Fofana organisé le samedi 13 août 2022 à la place Alassane Ouattara (ex Sagabo ) de Bouaké, le député de Diabo-Languibonou Assahoré Konan Jacques témoignait si bien  ''  Jean Claude Kouassi disait que nous autres nous sommes arrivés en politique par défaut contrairement à vous Bema, qui êtes un politicien né. En effet, la politique c'est votre métier. Ce qui séduit chez vous, c'est votre générosité et votre propension à aider les autres. L'objectif de la politique n'est-elle pas d'apporter le bien-être à nos parents ? »  S'il est vrai que le politique doit avoir des valeurs, il doit surtout se mouvoir à l'occupation du terrain politique.

 

d) Occupation du terrain politique

 

Lors du meeting du Réseau des amis de Bema Fofana ( RABF); à Bouaké le samedi 13 août 2022, le maître de cérémonie du jour, l'éminent orateur Bakayoko Daoudia dit Backus, venu de la région du Folon, à la présentation du député et adjoint au maire de Bouaké, Bema Fofana ne cessait de dire '' La politique, c'est le terrain, la politique c'est le terrain. Bema Fofana, c'est l'homme du terrain. Quand tu lâches le terrain, la politique te lâche..'' Il ne croyait pas si bien dire. 

En effet, la formation, la vision, les valeurs cultivées par le politique n'ont qu'un seul objectif, l'occupation et le contrôle du terrain politique. Dans la conception anglo-saxonne, le mot '' politique'' , est une trilogie qui signifie POLITY, POLITICS et POLICY. 

POLITY, c'est l'espace, la sphère, le terrain, le territoire. Être en politique, c'est occuper le terrain et non le virtuel, c'est être dans la sphère et non dans l'atmosphère. Il ne s'agit point de rester dans les salons feutrés et climatisés de la capitale ou sur les réseaux sociaux pour distiller des slogans ou des informations. Les réseaux sociaux avec l'avènement du numérique et des TIC ont certes une place de choix dans la politique en tant que moyens et outils de communication et d'information.  Mais il faut toujours pour le politique descendre sur le terrain, la sphère terrestre. La définition même des partis politiques prend en compte cette dimension territoriale, spatiale et sphérique.

 L'engagement politique ( POLITICS) doit donc se manifester sur le terrain politique (  POLITY) en vue une fois élu de mener des actions publiques ( POLICY) au service des populations. Dans l'approche de Lagroye, François et Sawicki, est politique '' Ce qui se rapporte au gouvernement d'une société dans son ensemble''. Cette définition englobe tout le sens du terme ''politique''. Elle englobe  surtout la politique comme espace, le terrain, en tant que espace d'occupation des activités et des conflits autour de la question du gouvernement de la société. C'est pourquoi les acteurs qu'ils soient adversaires ou partenaires au sein du même appareil politique se battent pour l'occupation de l'espace. Le politologue Julien Kouao Geoffroy le dit si bien '' En politique, tout le monde est adversaires que vous soyez ou non partenaires. La bataille est d'ailleurs plus rude entre partenaires qu'entre adversaires''. C'est le constat fait à titre d'illustration dans la région de Gbêkê. L'occupation de l'espace fait monter la tension entre partenaires du RHDP à Bouaké, Béoumi, Sakassou, Diabo-Languibonou. En effet, c'est un secret de polichinelle que des leaders du RHDP se marchent sur les platebandes. Pour le contrôle du terrain dans la cité du patriarche Nanan Koua Gbêkê, en prélude aux élections locales de 2023 ( régionales et municipales), les partisans d'Alassane Ouattara se regardent en chiens de faïence. Les tentatives de conciliation réussies aux élections départementales au sein du RHDP par Fanny Ibrahima ne sont qu'un paravent.

Dans la région du Hambol, localité voisine, même constat. Dans le septentrion ivoirien précisément dans la Bagoué, la tension monte tout comme dans le sud à Dabou ou à l'ouest dans le Bafing. Pourtant l'occupation du terrain peut se faire sainement sans violences pourvu que les acteurs en présence respectent certaines valeurs au nombre desquelles les principes et valeurs de la démocratie. Ce sera l'objet de notre prochain '' Samedi politique''. 

 

A samedi in challah, si Dieu le veut.

 

Allah KOUAME, Journaliste Politique, Juriste et Enseignant

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