Le Journaliste Allah KOUAME leve un coin de voile sur les probables successeurs des 3 leaders traditionnels pour les présidentielles de 2025
Votre rubrique préférée ''Samedi politique '' de ce jour décortiquera sur la base d'un critérium scientifique qui met en avant la science ( science politique) et la conscience ( bon sens) les potentiels candidats aux élections présidentielles de 2025. Avec une précision chirurgicale, Allah Kouamé décrit le portrait robot des potentiels successeurs d'Alassane Ouattara issus des différents partis politiques du champ politique ivoirien, au cas où le Chef de l'État Alassane Ouattara décidait de se retirer. Et avec lui, ses prédécesseurs Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo de la course à la présidentielle.
Probablement, aucun des leaders politiques ivoiriens qui ont occupé le marigot politique ces 30 dernières années ne sera sur la ligne de départ aux élections présidentielles de 2025. Il est donc opportun de faire une analyse des probables candidats pour la présidentielle ivoirienne de 2025 au cas où Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié ne seront pas dans les starting-blocks. Ne vous attendez pas à ce que je vous cite des noms comme on en compte déjà sous le manteau. Je veux parler de Achi Patrick, Tiemoko Meyliet, Kandia Camara, Tene Ibrahima Ouattara, Kafana Koné, Fidèle Gboroton Sarassoro pour le compte du Rhdp au pouvoir. Ou de Niamien N'goran, Maurice Kakou Guikahue, Thiam Augustin, Jean Louis Billon, Thierry Tanoh pour le Pdci-Rda. Ou encore de Mabri Toikeuse pour l'Udpci et Affi N'guessan pour le FPI, Hubert Oulaye, Assoua Adou, Koné Katinan, Damana Adia Pickass pour le Ppa-CI, Simone Ehivet Gbagbo pour le MGC...ou de Guillaume Soro pour GPS.
Vous constaterez avec moi que la liste est longue. Et elle n'est pas exhaustive. De nombreux cadres avant ceux précités se sont brûlés les ailes à la conquête de l'exécutif ivoirien.
C'est dire que pour aller à l'assaut du palais du Plateau, il faut avoir du potentiel. Il faut avoir du fonds comme Félix Houphouet-Boigny, Henri Konan Bédié, Laurent Gbagbo et surtout comme Alassane Ouattara en ont eu. Ce dernier a le mérite de diriger avec maestria depuis 2011 un État sorti exsangue de 30 années de crise militaro-politique. Si ces ex-présidents et président en exercice sont parvenus au sommet, c'est parce que ces leaders ont joui à un moment donné d'un capital politique confiance. En effet, il a fallu qu'il réunisse au moins 3 ou 4 voire 5 des 5 composantes du capital politique confiance mobilisables pour un leadership.
Bref, au cours de ce samedi politique du 10 septembre 2022, nous allons vous donner le portrait robot du potentiel successeur d'Alassane Ouattara à travers l'exposé et l'analyse des 5 composantes du capital politique confiance qui donnent un style au leader pour un leadership payant. Comme le dit Jean Bonin, juriste et homme politique ivoirien << Il appartient aux différentes chapelles politiques de faire preuve de réalisme politique et d’opérer en leur sein, en tant que de besoin, les réformes nécessaires pour ouvrir le jeu de la compétition démocratique interne en vue de faire émerger un nouveau leader et porte-étendard en leurs seins.>>
Sur cette base, épluchons les 5 composantes du capital politique confiance en les confrontant aux potentiels acteurs qui visent le fauteuil présidentiel au cas où Alassane Ouattara décidait de se retirer.
Il faut, avant d'aller plus loin noter que le leader est l'homme providentiel, le ''grand homme'' aux qualités exceptionnelles qui peut conduire un peuple vers un avenir meilleur, rayonnant et prometteur. Un tel leader peut apparaître essentiellement de deux faits complémentaires.
D'une part, le leader peut émerger du fait de ses qualités personnelles, intrinsèques, de son courage, de l'originalité de sa vision d'un monde meilleur, de sa capacité à susciter l'adhésion du peuple.Comme Laurent Gbagbo dans sa lutte pour une alternative démocratique en Côte d'Ivoire. Avant lui, Félix Houphouet Boigny dans sa lutte pour la décolonisation de la Côte d'Ivoire.
D'autre part, le leader peut naître des dynamiques d'une situation économique, politique, sociale où le leader émerge non pas spécifiquement en raison de ses qualités personnelles, mais parce qu'il incarne à un moment donné ce que la logique des faits aurait de toutes les façons imposé. On parle de leadership de situation. Le cas de Nelson Mandela en Afrique du Sud, De Gaule en France. La question algérienne provoque son retour aux affaires en 1958 en France. A un degré moindre le cas de Guei Robert qui se retrouve à la tête de la junte militaire en Côte d'Ivoire le 24 décembre 1999.
Enfin, il faut retenir que le leader peut naître des capacités personnelles et de la situation à la fois, quoi que les qualités personnelles soient déterminantes pour un leadership gagnant.
Un tel leadership, selon Lulin Elisabeth, doit se construire autour des 5 composantes du capital politique confiance dont la première est la composante morale.
1) La composante morale
La composante morale se manifeste par l'idéologie soutenue avec constance et conviction par le leader ou par un crédo politique que ce dernier défend. Elle peut également résulter des qualités personnelles du leader à savoir l'exemplarité de son comportement, sa réputation d'intégrité, de droiture et d'honnêteté. Alassane Ouattara avec son '' vivre ensemble'' ancrée dans son libéralisme est l'exemple parfait du leader dans sa composante morale. Sa réputation de banquier venu de la BCEAO et des institutions de Breton Woods l'ont mis en avant. Au cas où il décide de ne pas briguer un autre mandat, certains cadres de son parti jouissent de certaines de ses qualités. En tête visiblement son vice-président Tiemoko Meyliet et son Premier ministre Achi Patrick mais aussi Fidèle Sarassoro Gboroton, son directeur de cabinet. Vous conviendrez avec moi que si les compétences sont de mise chez ces prétendants, l'idéologie alassaniste n'est pas aussi forte. Ils devraient faire mieux en matière d'idéologie et de promotion de leur parti pour égaler des hommes ou femmes comme Amadou Gon Coulibaly, Hamed Bakayoko, Cissé Bacongo, Fanny Ibrahima, Kandia Camara, Henriette Diabaté que nous avons vu à l'œuvre.
Au Pdci-Rda, Henri Konan Bédié a hérité d'un poste de Président de la République par le truchement de l'article 11 de la constitution de 1960. Mais il est évident qu'il avait des qualités personnelles. Diplomate et diplômé d'économie, il a fait ses classes à divers niveaux de la nation. Mais qui peut lui succéder au Pdci-Rda? Visiblement des noms comme Jean Louis Billon, Thierry Tanoh, Tidiane Thiam circulent. Ces jeunes loups ont certes du potentiel intellectuel. Mais hormis, Billon de par ses activités entrepreneuriales, ils sont tous inconnus du grand public pour la défense de l'idéologie libérale centriste. Ils ne portent pas avec brio l'engagement militant au sein du vieux parti comme des apparatchiks tels que Maurice Kakou Gukahue, Akossi Bendjo.
A l'ex majorité présidentielle, Laurent Gbagbo a fait montre de ses qualités de combattant pour l'avènement d'un État démocratique. Dans son giron de la gauche démocratique, Pascal Affi Nguessan, Simone Gbagbo, Koné Katinan, Hubert Oulaye, Assoua Adou font figures de challengers. Il est évident qu'ils n'ont pas la verve idéologique et la poigne politique d'un certain Laurent Gbagbo. Et le combat, la vision nouvelle qu'ils proposent aux Ivoiriens, le panafricanisme manque d'originalité et est loin d'unir tous les ivoiriens. Il faut faire plus pour être un bon leader.
Enfin des politiques comme Albert Mabri Toikeuse, Guillaume Soro, Blé Goudé Charles, l'un pour ses qualités ministérielles et les deux derniers pour leur leadership de situation ont de la place dans le marigot politique ivoirien.
Toutefois, il faut bien plus que la composante morale. A celle-ci il faut adjoindre la composante affective.
2) La composante affective
Il s'agit ici de la part de confiance qui nait de la connaissance personnelle que l'ont peut avoir du leader au delà du rôle institutionnel qu'il endosse. Le potentiel successeur de Ouattara qu'il soit ou non du pouvoir doit créer des relations de proximité avec les populations. On l'a vu avec Guillaume Soro. Ce dernier juste après sa disgrâce avec Alassane Ouattara a entrepris des tournées à l'intérieur du pays. Dans la région du Hambol, il est allé au contact des paysans, sur les marchés dans les quartiers avant de se retrouver en exil. Avant lui, Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara ont multiplié ce genre de rencontres. Les politiques qui veulent prendre langue avec les élections présidentielles de 2025 n'ont pas d'autre choix que d'aller au contact des populations, des futurs électeurs. Mais que constatons-nous ? A trois ans des élections, aucun leader présidentiable n'est visible sur le terrain. Aucun parti n'a visiblement prédéterminé son candidat. La grande majorité des ivoiriens du nord au sud, d'est en ouest en passant par le centre n'a pas grand lien affectif avec des noms comme Tiemoko Meyliet, Assoua Adou, Koné Katinan, Thierry Tanoh, Tidiane Thiam. Certes Affi Nguessan a entrepris récemment des incursions au centre ouest. Mais il faut faire plus.
Par contre, des noms comme Patrick Achi, Pascal Affi Nguessan, Albert Mabri Toikeuse, Guillaume Soro, Blé Goude, Simone Gbagbo sont familiers. S'il est vrai que ce n'est pas l'intensité d'un Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo ou Henri Konan Bédié, il est bon de les retenir. A ses acteurs de faire monter leur capital politique confiance en améliorant la composante affective. Surtout que la composante morale n'est pas bien souvent présente encore moins la composante cognitive.
3) La composante cognitive
Elle fait appel à la part de confiance née de l'expertise, de la compétence, des connaissances reconnues au leader. L'on a confiance au leader qui est considéré comme un érudit, un sachant qui sait de quoi il parle, et qui doit avoir raison. Alassane Ouattara joui de cette composante cognitive depuis son entrée en politique en tant que président du comité interministériel de redressement de l'économie ivoirienne en 1989 jusqu'à ce jour. Sa connaissance des milieux et dossiers économiques ou financiers plaident en sa faveur. Il a le plus mis en valeur cette composante dans le marigot politique ivoirien. Félix Houphouet Boigny lui même en était convaincu en le nommant ensuite au poste de Premier ministre. L'actuel Premier ministre Patrick Achi dans son sillage bénéficie de cette composante cognitive comme cela l'a été pour Amadou Gon Coulibaly. Le jeune Tidiane Thiam est auréolé de cette composante cognitive. Il suffit pour ces deux leaders de renforcer les composantes morale et affective pour prétendre valablement à un leadership gagnant. Mais il faut aussi comme Alassane Ouattara cultiver la composante performative du capital politique confiance.
4) La composante performative
Elle nait du constat des accomplissements passés du leader, des réussites dont il a été l'artisan. L'on estime que le leader ayant déjà fait ses preuves ailleurs est crédible. Encore une fois Alassane Ouattara a bénéficié de cette composante dans la sphère politique ivoirienne.
Présentéé comme un technocrate venu des institutions de Breton Woods ( FMI, Banque mondiale), il est arrivé avec le plan Alassane pour redresser l'économie ivoirienne en banqueroute. En 100 jours, il réussit à mettre en confiance les ivoiriens qui ne supportaient pas les rigueurs du plan Koumoue Koffi Moïse. Soro Guillaume dans son ascension au sein de la Fesci a joui de cette composante pour se positionner dans la rébellion des Forces nouvelles avant de devenir l'un des meilleurs premiers ministres de Laurent Gbagbo ( c'est Gbagbo lui même qui le dit) en réussissant la sortie de crise avec l'organisation d'élections présidentielles en 2010. Sa gestion de la crise post électorale plaide également en sa faveur.
Patrick Achi est visible dans le camp présidentiel comme celui qui glane le plus de lauriers au vu de cette composante. Le vice-président Tiemoko Meyliet est aussi dans le starting-blocks tout comme Sarassoro Fidèle qui a également eu une carrière internationale fournie.
Côté Pdci-Rda Tidiane Thiam a la réputation d'avoir fait ses preuves dans les banques européennes à la suite d'études sérieuses à Polytechnique Paris. Mais au-delà de tout, il faut aussi la composante institutionnelle.
5) La composante institutionnelle
Il s'agit de la part de confiance qui nait de l'assurance que le citoyen peut avoir que les décisions seront prises en respectant un minimum de principes démocratiques notamment la consultation des parties concernées, la transparence des choix. Il s'agit pour un État démocratique de savoir pour le citoyen si le leader sera enclin au respect de l'État de droit, de la bonne gouvernance, de l'expression plurielle et du respect des droits de l'homme et du citoyen.
Dans nos Etats en transition démocratique, cette composante est d'actualité. Laurent Gbagbo en 1990 a porté l'espoir d'une alternance démocratique pacifique avant de tomber dans les travers entre 2000 et 2010. Avant lui, Henri Konan Bédié s'est incrustée dans une logique de confiscation du pouvoir en mettant en avant l'ivoirité comme crédo politique. Pour être des leaders porteur d'espoir, la génération de 2025 doit rassurer sur ce pan du capital politique confiance. En réalité c'est le refus des règles institutionnelles et des institutions qui met à mal nos Etats. C'est pourquoi après avoir vu la politique, la démocratie nous allons jeter un regard sur le régime politique ivoirien. Ce sera l'objet de notre prochain samedi politique.
Conclusion
C'est vrai! En l'entame, j'ai dit que je ne donnerai pas de nom de leader pour les élections de 2025 au cas où les mentors renonçaient à la course. Mais je ne voudrais pas être de ceux qui professent sans trancher. A l'observation et à l'analyse si les choses restent en l'état des noms de dégagent au vu des critères scientifiques que nous avons ci-dessus énumérés.
Au Rhdp au pouvoir, si Ouattara decide de ne plus y aller, le meilleur cheval c'est Patrick Achi Jérôme. Il a l'avantage de réunir quasiment 4,5 sur 5 des composantes de leadership ébauchées. Il a aussi l'avantage d'être issu du Pdci-Rda, du sud généralement FPI et de s'être retrouvé au Rhdp avec d'autres cadres du RDR. Il ne lui reste qu'à être loyal avec son mentor Alassane Ouattara et gagner la confiance des apparatchiks du défunt RDR ainsi que des caciques cadres comme simples militants pour rafler la mise au nom de son parti.
Au Pdci-Rda, deuxième force politique du pays à ce jour, si Henri Konan Bédié arrête, Tidiane Thiam dit Titi, aujourd'hui âgé de 60 a le profil idéal pour se mesurer à Patrick Achi. Il présente au moins 3 composantes sur 5 du capital politique confiance. En effet il lui reste à créer des relations de proximité avec les populations et d'intégrer l'idéologie Pdci-Rda avec un crédo propre à lui.
Au FPI, Affi Nguessan reste un leader au fort capital politique. Mais la déchirure avec Laurent Gbagbo n'est pas faite pour arranger les choses.
Au Ppa-Ci, en l'absence de Gbagbo, le tableau n'est pas reluisant. Affi Nguessan était le poulain qui pouvait s'affirmer. Il s'est affranchi de son maître. Idem pour Mamadou Koulibaly, Blé Goude Charles et Simone Gbagbo. Bien qu'ayant des talents évidents, Ils doivent encore patienter. Visiblement Assoua Adou et autres proches de Laurent Gbagbo peinent à trouver leurs marques.
Guillaume Soro et le GPS privés du Rhdp mais surtout de l'ex RDR ne peuvent donner bonne mine en 2025. Bien que l'ex Premier ministre a des qualités de leadership indéniable, il lui sera difficile de s'imposer sans le soutien de Ouattara et de son parti.
À samedi in challah si Dieu le veut
Allah Kouamé, Journaliste politique
Références
Cours de comportements politiques, Master 1 Sciences politiques 2021-2022
Docteur Fofana Moussa, Université Alassane Ouattara Bouaké