1933 Articles 19 Vidéos + 100 000 Visites / Mois Bouaké, Côte d'Ivoire
Ils sont, pour certains, détenteurs de titres de propriété ; pour d'autres, d'un arrêté ministériel d'approbation en règle. Et pourtant, parallèlement à la construction de l'autoroute Mondoukou-Assouindé, c'est la croix et la bannière pour la multitude de propriétaires impactés par l'ouvrage. C'est pour se faire entendre, dans l'espoir d'une réhabilitation dans les droits, qu'ils ont vidé leur sac, ce lundi 10 octobre, à la maison de la presse d'Abidjan.
Souffrances, agacement et peines
Cet échantillon représentatif des 177 propriétaires recensés sur le site a partagé avec la presse, leurs peines, leur agacement et leurs souffrances face à l'évolution du projet de construction de l'autoroute. "En octobre 2021, une autoroute a vu le jour entre Mondoukou et Assouindé. Un beau projet en perspective ; cependant, il a vite tourné au cauchemar pour les propriétaires des terrains qui ont été mis en valeur ou non, construits pour certains avec des biens immobiliers. L'implantation de l'autoroute nécessitant une emprise, les parcelles sous cette emprise ont été affectées gravement sans aucune information", ont-ils expliqué, ajoutant que "du jour au lendemain, nous avons vu des habitations, des commerces, des terrains détruits, rasés ou démolis". Ce n’est pas facile pour nous de perdre ces lots acquis à la sueur de nos durs labeurs. Moi j’y tient déjà un commerce, c’est toute ma vie. J’ai fait endetter mes parents pour investir dans ce projet », raconte toute abattue une propriétaire. Et un autre d’ajouter : « J’ai bâti un hôtel de neuf chambres, un terrain synthétique de 1000 m2 en vue de faire un projet d’éducation sportive. Un jour, alors que j’étais en route pour mon site, on m’annonce au téléphone que je serai déguerpi. Imaginez-vous l’état dans lequel j’étais en ce moment précis ».
Démarches sans suite
Selon le collectif, une rencontre fut organisée le 26 novembre 2021, avec les représentants des entités AGEROUTE, BENETD, Mairie d'Assinie et cabinet d'impact, afin de donner plus de visibilité à leur requête. Réunion au cours de laquelle, les parties prenantes, disent-ils, s'étaient excusées face aux impactés. La situation n'a, pour autant, pas évolué vers un début de solution. C'est alors qu'Assemian Emmanuel, président dudit collectif, et ses pairs, ont adressé, le 04 juillet 2022, un courrier avec accusé de réception au ministère de la Construction d'Assinie, à la sous-préfecture d'Assinie, au cabinet du Premier ministre, à l'Ageroute, au ministère de l'Équipement et de l'Entretien routier. Des démarches entreprises, pour bénéficier d'un dédommagement, mais qui sont malheureusement restées sans suite, déplorent-ils. A en croire les impactés, seul Porteo Btp, l'entreprise chargée des travaux, a réagi à leur requête disant ne pas être en mesure d'apporter les "réponses appropriées sur ce sujet administratif".
Expropriation de terrains acquis légalement...
Sur ces entrefaites, les impactés ont reçu, début octobre 2022, un avis de déguerpissement sous sept jours leur indiquant qu'ils occupent un domaine public. Chose qu'ils contestent preuve à l'appui. " L'intégralité de ces lots sont tous dûment approuvés par des arrêtés par des arrêtés d'approbation portant les numéros : 14-0047 du 14 mai 2014 ; 24-0460 du 18 Août 2014 et 16-0007 du 06 janvier 2016. Donc lesdits lots ne sont pas du domaine public", ont-ils brandi. Avant de s'interroger en ces termes :" Comment le directeur du domaine public peut-il vouloir exproprier de leurs terrains des propriétaires qui les ont légalement acquis ? Ils sont tous détenteurs soit de titres de propriété soit d'un arrêté d'approbation en règle". Mais alors qu'ils ont fait confiance aux différentes administrations, les propriétaires de lots sous l’emprise de l’autoroute soutiennent que leur appel est resté lettre morte.
Appel pressant à l'État de Côte d'Ivoire
Pour Assemian Emmanuel et ses pairs, qui soupçonnent des manœuvres souterraines dans la prise en compte de leurs préoccupations, toute approche de conciliation étant rendue impossible, reste le recours à l'État de Côte d'Ivoire. Aussi, ont-ils profité de la conférence de presse du lundi pour interpeller les autorités compétentes. "Nous lançons, ici et maintenant, un appel à la Présidence de la République et encore aux ministères afin qu'ils se saisissent de ce dossier ; toute chose que fera valoir nos droits. Nous avons foi en la Côte d'Ivoire qui est un État de droit", plaide le collectif". Ils menacent, enfin, de bloquer la route dans les prochains jours, si leur cri de cœur n’est pas attendu. Affaire à suivre.
MARIUS DE GNALEY