1933 Articles 19 Vidéos + 100 000 Visites / Mois Bouaké, Côte d'Ivoire
Alors que nous sommes sur la toile ce vendredi 9 septembre 2022 pour parfaire les dernières lignes de notre samedi politique du 10 septembre 2022, un message nous parvient sur le smartphone. Environ 1000 jeunes filles, des amazones dit-on proches d'un parti politique ( que je ne nomme pas à dessein) viennent de recevoir des ordinateurs et du numéraire pour leur soutien à ce parti mais aussi à un leader sur place à Bouaké. Ma réaction est immédiate. << C'est quoi ça encore ?>>, ai-je interrogé. Un confrère réagit << Club de soutien politique, hummm >>. << Au lieu de construire de véritables partis politiques, nos hommes politiques se trompent avec de tels mouvements. Et ceux qui les entourent sont incapables de leur dire la vérité. Rien de sérieux dans tout ça.>>, ai-je poursuivi. Puis de clore par << Ils ne savent même pas ce que c'est qu'un parti politique. Ils viennent tous d'être élus secrétaires départementaux pour les uns ou présidents de comités de base pour les autres, et ils se font soutenir par des mouvements de soutien. Si c'est moi Ado, je dissous tous ces mouvements. C'est la source des palabres dans nos villes entre les cadres des différents partis politiques.>>
Il est triste de constater que nos leaders politiques qu'ils soient du pouvoir comme de l'opposition créent ou adhèrent à des partis politiques sans savoir ce que c'est qu'un parti politique. Cette méconnaissance des partis politiques et de leur fonctionnement conduit à la déliquescence des partis politiques Ivoiriens. Les partis politiques sont en crise. Et avec eux la démocratie. Dans le cadre de ce samedi politique du 17 septembre 2022, nous avions prévus aborder la méconnaissance du régime politique ivoirien. Mais il urge de parler de la déliquescence des partis politiques en vue de leur renaissance.
1) De la déliquescence des partis politiques
La sphère politique est régie par des acteurs politiques. Au nombre de ceux-ci, abstraction faite de l'État, il existe les acteurs partisans, les acteurs sociaux et les acteurs idéologiques. Au titre des acteurs partisans les partis politiques occupent une place de choix.
Avant d'aller en profondeur un parti politique est un groupement privé qui ne vise que la conquête et l'exercice du pouvoir étatique. La Côte d'Ivoire compte aujourd'hui plus de 200 partis politiques déclarés. Les plus en vue sont le Pdci-Rda, le Rhdp, le FPi, le Ppa-CI, l'Udpci qui vient de se fondre dans le Rhdp. Mais un constat se dégage dans le fonctionnement de ces partis, il s'agit de la tendance à la vassalisation à des leaders au sein de ces formations politiques plutôt qu'à la défense d'une idéologie et la construction d'un idéal dans le parti. Ce qui fait que les partis politiques sont en perte de vitesse. Ils sont en crise car les partis sont ignorés, et concurrencés.
a) Les partis politiques ignorés
Dans le fonctionnement des partis politiques, les organes du parti sont ignorés dans leur mise en place et dans leur fonctionnement. Concernant leur mise en place, des structures et instances du parti ne sont pas mises en place. Quand elles sont mises en place, elles ne sont pas pourvues en personnel politique. Quand elles sont pourvues en personnel politique, ces instances ne sont pas consultées avant toute prise de décisions. En effet les décisions sont prises par des notables au nom des militants. Les militants ne sont point consultés encore moins les adhérents. Ce qui devait être l'inverse. Quitte à informer les militants et cadres par la suite.
Plusieurs exemples dans le marigot politique ivoirien peuvent illustrer cette méconnaissance ou ignorance des règles de fonctionnement des partis politiques. Qui ne se souvient de l'Appel de Daoukro lancé par le président Henri Konan Bédié à la veille des élections présidentielles de 2015. Sans consulter la base de son parti le Pdci-Rda, Henri Konan Bédié appelait les militants du vieux parti à adouber Alassane Ouattara comme candidat unique du RHDP, alors coalition politique. De la même façon, il va quitter le RHDP avec fracas, à la suite d'une mésentente avec le camp Ouattara sur la mise en place du parti unifié. Dans la même veine, le RDR, parti d'Alassane Ouattara a été dissout pour se fondre dans le RHDP parti unifié sans rencontres ni échanges préalables avec la base militante qu'on retrouve essentiellement dans les comités de base et les sections.
Récemment le retour de Mabri Toikeuse au RHDP se fait sans en informer les militants du RHDP d'une part et d'autre part ceux de l'Udpci. Mabri Toikeuse dans sa déclaration de retour indique simplement qu'il en a discuté avec les cadres de son parti en occultant de parler des militants.
Dans le choix des candidats pour les différentes élections, les militants des partis sont toujours ignorés. Depuis le sommet, l'on leur impose des individus qu'ils ne connaissent très souvent pas. Et les choix sont imposés au vu de la manne financière du nouveau venu ou de son lien avec les barons du parti. Rien n'a voir ni à avoir avec le militantisme. Seul le cens ( argent) a un sens ( signification) en un sens où le suffrage censitaire est interdit. C'est le règne de la ploutocratie dans le parti. Pour être adoubé, le militantisme ne compte pas, pourvu d'avoir de l'argent. Une caution financière est même exigée au sein du parti. Aux dernières élections des secrétaires départementaux du RHDP, une caution pour postuler était exigée.
La déliquescence des partis politiques Ivoiriens ne s'arrête pas qu'à l'ignorance des partis. Ces derniers sont aussi concurrencés.
b) Les partis politiques concurrencés
Les partis politiques sont concurrencés par d'autres acteurs ou structures parallèles au sein du parti. La concurrence a existé dans un passé récent dans d'autres partis. Mais elle continue de l'être aujourd'hui dans de nombreux partis ivoiriens. Il s'agit de la concurrence des mouvements de soutien aux partis politiques, aux leaders du parti, mais surtout aux pontes ou cadres du parti au plan local ou national. Toutes ces structures parallèles mènent une concurrence déloyale qui met à mal l'unité et la cohésion au sein du parti.
Les faits sont avérés. Lorsque Henri Konan Bédié arrive au pouvoir par le truchement de l'article 11 de la constitution de la première République qui fait de lui le Chef de l'État, il n'a pas une main mise sur le Pdci-Rda. Alors il va multiplier les groupes de soutien entre 1990 et 1999. On assiste avec Pierre Gnanhi Nda à la mise en place du Cercle national Bédié ( CNB) qui avait des sections à l'intérieur du pays. Il y a eu aussi le mouvement Bédié An Bi ko ( en malinke, Bédié nous sommes avec toi) animé sur place à Bouaké par Docteur Idrissa Diabaté. Il n'est pas seul dans ce cas. Alassane Ouattara, l'actuel Chef de l'État a aussi eu ses mouvements de soutien au nombre desquels le cercle Alassane Dramane Ouattara ( CADO) de Thierry Legré. Il y a eu aussi les Ado Girls. Au lieu de se retrouver dans les structures spécialisées, sont mis en avant ces groupuscules de soutien aux barons du parti.
Même le Front populaire ivoirien ( FPI) n'a pas échappé à cette clanisation des partis. Quand éclate la guerre en septembre 2002, Charles Blé Goude créé le Cojep, coordination des jeunes patriotes, mouvement proche de Laurent Gbagbo. Mais l'ex leader estudiantin refusera d'adhérer au FPI comme son ex camarade de la Fesci Damana Adia Pickass. Quant à Djue Ngoran Eugène, militant du FPI à l'époque proche de Simone Gbagbo, il crée l'Union pour la libération totale de la Côte d'Ivoire ( Upltci).
Au RDR puis au RHDP, Guillaume Soro et ses proches vont aussi créer des mouvements parallèles avec Kanigui Soro pour concurrencer d'abord le RDR, puis le RHDP. Il s'agit du rassemblement pour la Côte d'Ivoire ( RACI). Par la suite verra jour les mouvements pro-Soro entre autres GKS team.
Au plan local, la situation est plus poussée. Chaque leader se réclamant d'un parti notamment au RHDP à sa team. A Bouaké, par exemple nous avons CAK , Team TS, Team STT ,MJAK, RABF , Team JCK, COSADO, COMADE, MURIR, JPAD, .... Et ces différents clans au sein du RHDP local rivalisent d'ardeur au détriment des militants. Fanny Ibrahima, timonier du RDR à Bouaké n'a jamais senti le besoin de créer un fan club en son nom. Il s'est investi a implanter un parti politique. Les membres de ces teams ne militent pas forcément au RHDP. Ils n'ont aucune carte de militant. Ils ne savent pas ce que c'est que le RHDP. Demandez leur, et vous vous en rendrez désespérément compte. Les vrais militants sont là ignorés. Pourtant les teams, les équipes, les clans, les clubs de soutien, les cliques sont mis en avant. Tout ce qui doit revenir aux militants ou au parti sont reversés aux membres de ces clans.Ils sont entretenus, équipés en ordinateurs, en matériels roulants au détriment des militants du parti et du parti lui-même. Dépités et furieux, Sylla Siaka, délégué de secteur RHDP a dénoncé cette marginalisation des structures du RHDP à Bouaké. Il a mis en place la coordination des délégués de secteurs du RHDP en vue de faire vivre le RHDP.
Pour mettre fin à ce qui peut être considéré comme le déclin des partis ivoiriens, c'est simple. Il suffit de restituer aux partis leur originalité par la renaissance.
2) De la nécessité de la renaissance des partis politiques Ivoiriens
Pour faire renaître les partis politiques ivoiriens, il faut maîtriser la définition et la typologie des partis politiques (a). De cette définition et typologie, il ressort les critères d'existence d'un parti politique (b) ainsi que les fonctions d'un parti politique (c) pour son fonctionnement adéquat. Il faut élucider ces différents éléments successivement.
a) Définition et typologie des partis politiques
a 1) Définition des partis politiques
Pour le politologue français Philippe Braud, << les partis politiques sont à la fois des machines électorales, des arènes de débats et des agents de socialisation >>. Le politologue ivoirien Julien Kouao Geoffroy ajoute << Qu'est-ce qu'un parti politique ? Un parti politique est une organisation durable agencée du niveau national au niveau local, visant à conquérir et à exercer le pouvoir, et recherchant, à cette fin, le soutien populaire. >>.
Si le phénomène partisan existe depuis l'époque de l'Europe médiévale, les partis politiques tels que nous les apprehendons aujourd'hui sont récents car leur apparition date de la seconde moitié du XIX ème siècle. Ils sont nés avec le suffrage universel. Pour employer l'expression du politologue allemand Max Weber, << Les partis politiques sont les enfants de la démocratie, du suffrage universel...>>. Leur typologie le démontre aisément.
a 2) Typologie des partis politiques
Concernant la typologie, Maurice Duverger, politiste français, professeur de droit constitutionnel et de la sociologie du droit fait la distinction entre les partis de cadres et les partis de masse.
Les partis de cadres sont principalement tournés vers l'élection. Ils cherchent à recruter leurs membres parmi les notables dont la fortune et ou le prestige peuvent constituer une source de financement pour une partie des campagnes électorales et de l'activité politique. En Côte d'Ivoire, des partis comme le Pdci-Rda, le RHDP, voire le FPI sont passés de partis de masses à des partis de cadres. Seuls les grands bonnets, aujourd'hui les notables dans ces partis dictent leurs volontés aux militants. Ils financent le parti aussi bien au plan national qu'au plan local. Ils ne se privent pas de créer des mouvements de soutien à leur personne ou à leurs actions quand ils se sentent lâchés par les instances du parti.
Alassane Ouattara au RHDP avec les élections internes des 350 secrétaires départementaux le 23 juillet 2022 investis le 12 septembre 2022 est en train de restituer progressivement à la masse le parti.
Les partis de masse cherchent plutôt les adhérents des classes populaires. Les premiers partis de masse sont issus du mouvement ouvrier et ont cherché à prolonger les luttes sociales sur le terrain politique. Si les partis politiques ivoiriens comme le RHDP, le Pdci-Rda, le FPi sont organisés et hiérarchisés comme des partis de masse, ils fonctionnent comme des partis de cadres. En effet ces partis ont tendance à recruter massivement les militants. Malheureusement la mission d'éducation politique des classes populaires ainsi que des élites non issues de la bourgeoisie à l'idéologie du parti qui devait suivre dans les partis de masse ne l'est pas. Logiquement les partis de masse sont essentiellement financés par les cotisations des adhérents qui élisent à la tête du parti une équipe dirigeante permanente.
L'on fait aussi le distinguo idéologique entre partis libéraux et partis socialistes, entre partis de droite et partis de gauche, entre partis centristes et partis d'extrême droite mais aussi partis d'extrême gauche. Ainsi en Côte d'Ivoire le RHDP se réclame parti libéral étant membre de l'international libéral, le Pdci-Rda se dit parti libéral de droite, le FPi parti socialiste d'extrême gauche, le Ppa-CI de Laurent Gbagbo se dit socialiste et panafricaniste de gauche démocratique. Quoi qu'il en soit, tous ces partis politiques ivoiriens se comportent selon l'expression d'Otto Kirchheimer comme des partis << attrape-tout >>. Pour cet auteur dans les partis << attrape-tout>>, les clivages idéologiques et sociaux se sont atténués et la distinction entre les partis de cadres et de masse n'est plus aussi claire qu'auparavant.
Quelle que soit la typologie des partis, un certain nombre de critères permettent de les distinguer d'autres structures.
b) Les critères d'existence d'un parti politique
Le politologue ivoirien Geoffroy Julien Kouao dans la lignée proposée par Joseph Lapalombara et Myron Weiner determine 4 critères d'existence d'un parti politique. En effet pour Julien Kouao Geoffroy << un parti politique repose sur 4 critères : la continuité de l'organisation, une organisation complète du niveau local au niveau national, la volonté d'exercer le pouvoir, la recherche d'un soutien populaire spécialement par le canal des élections.>>
Nous allons aborder ces éléments.
b1) La continuité de l'organisation
Le parti politique est une organisation durable, c'est-à-dire une organisation dont l'espérance de vie est supérieure à celle des dirigeants en place. Ce critère permet d'écarter les clientèles, les clans, les factions, les cliques. Ce critère permet de distinguer les partis des éléments précités ainsi que des groupes révolutionnaires ou rebelles qui disparaissent avec leurs fondateurs ou animateurs. Le Pdci-Rda fondé par Félix Houphouet Boigny et ses camarades en lutte contre la colonisation a aujourd'hui survécu à ses créateurs. Le FPI créé par Laurent Gbagbo et autres compagnons de route est aujourd'hui dirigé par Pascal Affi Nguessan. L'Udpci de Guei Robert avant sa prochaine fusion au RHDP est aujourd'hui dirigé par Mabri Toikeuse. Le décès prématuré de Djeny Kobena n'a pas empêché le RDR d'exister et d'avoir une envergure nationale.
b 2) L'envergure de l'organisation
Le parti politique doit exister aussi bien sur le plan national que local. Il s'agit de sa capacité d'affirmer sa présence dans les régions et d'attirer le soutien des élites locales. Un parti politique c'est donc une direction centrale et surtout des sections locales sur toute l'étendue du territoire national. Il permet de distinguer les partis politiques des groupes parlementaires qui n'existent qu'au plan national. Un parti politique, c'est aussi un siège et des structures de jeunesse, de femmes, d'enseignants... rattachés au parti et non des mouvements de soutien rattachés à des leaders ou des cadres locaux comme c'est bien malheureusement le cas en Côte d'Ivoire. Il faut donc mettre fin au règne des Team, ou fan club, ou mouvements de soutien à tel individu comme c'est le cas au RHDP en ce moment. Il faut revaloriser le président de comité de base, le délégué de secteur, le secrétaire de section. Celui qui veut militer qu'il s'inscrive dans un comité de base au lieu de tergiverser dans la poursuite de la conquête et l'exercice du pouvoir par le parti politique.
b 3 ) La volonté de conquérir et d'exercer le pouvoir politique
Ce 3eme critère permet de faire la différence entre les partis politiques et les groupes d'intérêts et de pression, les lobbies que sont les organisations non gouvernementales (ONG) qui peuvent avoir les mêmes envergures, la même permanence sans la conquête et l'exercice du pouvoir politique. L'objectif de tout parti est de s'emparer du pouvoir ou de participer à son exercice. Il veut figurer au parlement, gérer des collectivités locales à travers la recherche d'un soutien populaire par la voie des élections.
b 4) La recherche du soutien populaire spécialement par le canal des élections
Ce critère permet de distinguer les partis politiques des simples clubs de soutien qui ne participent ni aux élections, ni à la vie parlementaire. Ces clubs de soutien ne sont à la limite que des laboratoires d'idées, de réflexions où l'on peut aussi retrouver des acteurs de propagande inutile, des personnes faisant du vuvuzela, du m'as-tu-vu, de l'escroquerie politique. A la moindre difficulté, ces mouvements de soutien disparaissent, pour faire place aux partis politiques. Dès la chute de Henri Konan Bédié, le cercle national Bédié ( CNB) ainsi que le mouvement Bédié An Bi ko ont disparu du marigot politique ivoirien. Seul le Pdci-Rda a fait face à la junte militaire de Guei Robert pour faire revenir Henri Konan Bédié. Quand Alassane Ouattara a des difficultés avec les régimes successifs de Henri Konan Bédié, Guei Robert, Laurent Gbagbo, c'est le RDR qui va porter le combat. Des mouvements comme le Cercle Alassane Dramane Ouattara ( CADO) ont été dissout par le fondateur Thierry Legre qui s'est retrouvé dans la galaxie patriotique. Dernier exemple, Guillaume Soro faute d'avoir créé un parti politique enraciné ( GPS étant embryonnaire) et s'étant focalisé sur les groupes de soutien tels le RACI de Kanigui Soro ou le Forum de Soro Alphonse et autres mouvements soroistes est aujourd'hui en difficulté. C'est pourquoi les hommes politiques doivent se méfier des mouvements de soutien à leur personne ou à leurs actions et se fier aux partis politiques. Les militants savent être reconnaissants aux responsables politiques qui s'investissent dans et pour le parti. Il ne sert à rien de financer des mouvements parallèles et concurrents à votre parti. Ceux-ci ne rempliront jamais les fonctions dévolues aux partis politiques.
c) Les fonctions des partis politiques
<< Les partis politiques, pour reprendre l'expression chère à Max Weber, sont les enfants de la démocratie, du suffrage universel.>>. Les partis politiques sont donc les institutions centrales de la démocratie. C'est pourquoi il faut éviter la crise des partis en évitant de les fragiliser et concurrencer comme c'est le cas actuellement en Côte d'Ivoire. Heureusement que certains leaders comme Alassane Ouattara l'ont compris en mettant en avant les instances du RHDP à travers l'élection des secrétaires départementaux. Laurent Gbagbo lors de la création du Ppa-CI a recommandé à tous ceux qui se reconnaissent en lui de s'inscrire au Ppa-CI. Les autres partis devraient leur emboîter le pas.
Des auteurs comme Robert Merton font la distinction entre les fonctions manifestes ( explicites) des partis politiques et les fonctions latentes ( implicites). A sa suite, Jean-Marie Denquin propose de regrouper les fonctions des partis politiques en trois catégories. Mais Georges Lavau ajoute une autre catégorie qui est latente.
c 1) La fonction de structuration de la vie politique
Si les partis politiques n'existaient pas, aux dires de Jean-Marie Denquin, << la vie politique serait une mêlée générale où chacun des acteurs ne lutterait que pour lui-même et ne représenterait que lui-même >>. Les partis politiques structurent donc l'arène politique en présentant des programmes politiques en principe diffèrents. Ils permettent d'étiqueter les candidats aux élections. Cette fonction dite programmatique ou de formation de l'opinion consiste à former l'opinion par la présentation aux électeurs d'un ensemble d'options et par l'animation du débat politique. Cette fonction permet aux électeurs de savoir quelle action mènera tel candidat s'il est élu. Ce qui suppose aussi que le parti peut sélectionner les candidats aux élections.
c 2) La fonction de sélection du personnel politique
La fonction sélective consiste en la sélection des candidats aux joutes électorales, c'est-à-dire à recruter le personnel politique par la désignation des candidats aux élections et aux responsabilités gouvernementales. La plupart des candidats désignés aux élections le sont en principe par les partis politiques. Ils ne le sont pas par les mouvements de soutien. Alors d'où vient-il alors que des cadres élus député, maire, sénateur ou nommés ministre se sentent redevables à des clubs de soutien et non à un parti politique. Il en devrait être ainsi pour un candidat indépendant qui devrait don élection à un club de soutien. Autrement un candidat d'un parti politique élu ne saurait se soustraire à son parti au profit d'un fan club.
Mais pour que le choix des candidats soit crédible, il est bon que la base intervienne par des primaires dans le choix des candidats et non la direction du parti. C'est à ce prix que les partis peuvent jouer leur rôle d'intégration sociale.
c 3) La fonction d'intégration sociale
Par cette fonction, les partis politiques servent à garantir la stabilité et l'ordre politique. Les partis ont la charge de socialiser les citoyens ordinaires en clarifiant les enjeux, en les incluant dans le système par le biais de l'offre politique. Le rôle des partis politiques consiste à assurer l'ordre social en résolvant les conflits au moyen d'élections. La présence des partis permet de canaliser le mécontentement de certaines forces sociales qui seraient tentées en l'absence de tribunes d'expression de renverser le pouvoir par la force. En octobre 2000 lorsque les militants du RDR descendent dans la rue pour exiger la reprise des élections présidentielles, il a fallu l'appel des cadres du RDR pour les retirer de la rue. Laurent Gbagbo et Guei Robert réclamaient chacun à cette époque la victoire électorale alors que ni le RDR ni le Pdci-Rda n'avaient été autorisés à prendre part aux élections. En 2020, il a fallu l'appel à l'apaisement de Henri Konan Bédié pour mettre fin au mot d'ordre de désobéissance civile initié par l'opposition conduire par le Pdci-Rda contre le 3eme mandat d'Alassane Ouattara.
Il faut dire aussi que les partis donnent une tribune d'expression aux critiques du système. Georges Lavan les décrit comme remplissant une fonction tribunitienne.
c 4) La fonction tribunitienne
Ici les partis politiques sont les porte- paroles, les porte-voix des sans voix, des opprimés, des groupes sociaux défavorisés. La fonction tribunitienne consiste à assurer la défense de certaines catégories sociales en voie de marginalisation. La connaissance et la mise en œuvre des fonctions des partis politiques facilitent le fonctionnement des partis.
d) Fonctionnement des partis politiques
Pour fonctionner un parti politique a besoin de moyens humains, financiers et matériels mais surtout du respect des règles de fonctionnement d'une telle organisation. Ici nous allons insister sur les hommes dans l'animation du parti.
L'homme est la première source de la richesse. Le capital humain est donc indissociable de toute activité politique. Les partis politiques ont donc besoin d'hommes pour fonctionner. Ils ont besoin de sympathisants, d'adhérents mais surtout de militants pour animer les différentes instances et structures du parti. Ils ont aussi besoin de cadres pour gérer le moment venu le pouvoir d'État.
Les sympathisants soutiennent les actions de tel ou tel parti sans adhérer formellement à ce parti.
Les adhérents ont formellement adhéré au parti en prenant une carte de militant, mais aussi en payant leur cotisation. Le FPI à ses heures de gloire entre 1990 et 2000 a connu ce genre d'adhésion. Le RDR a aussi connu des adhésions massives entre 1994 et 2010. Le Pdci-Rda a également enregistré de nombreux adhérents durant son long parcours.
Les militants sont les soldats du parti. Pour Maurice Duverger ce sont des adhérents actifs. Selon Max Weber, les militants sont des agents << intéressés politiquement qui exercent une action continue au service d'un parti politique>>.
Que constatons-nous ? Des leaders et responsables de partis politiques au lieu de travailler à faire adhérer des personnes à leur parti les encourage à soutenir leur personne et leurs actions en tant qu'individu. Pourtant vous êtes conscients que vous êtes au poste où vous êtes grâce à un parti politique, ou sous la coupole et le soutien d'un parti politique. Si vous êtes député, sénateur, maire ou ministre , c'est sous l'onction d'un parti. Alors pourquoi ignorer ce parti pour faire la promotion de groupes de soutien à votre personne ou vos actions personnelles. Accepter de soutenir ce genre de mouvement de soutien, c'est encourager le déni des partis politiques. C'est encourager le camouflage politique. En tant que responsable, vous devez pouvoir dire à ces mouvements qui disent vous soutenir d'adhérer à votre parti. Quand un mouvement de soutien à un ministre issu du RHDP dit compter 1000 jeunes filles, c'est dire qu'au sein d'un parti comme le RHDP c'est 40 comités de base: à raison de 25 membres par comité de base. Soit environ 4 sections à raison de 10 comités par section. Du bluff tout simplement pour recevoir des ordinateurs, du numéraire pendant que le parti qui nous a fait ploie sous les difficultés. Le FPI et le Pdci-Rda sont moins exposés à cette pression des mouvements de soutien. C'est au RHDP que nous constatons cette course aux mouvements de soutien. Les directions des partis qui veulent se construire doivent pouvoir mettre fin à cette confusion. C'est la porte ouverte aux candidatures indépendantes proches des partis. À Bouaké, quasiment tous les leaders au RHDP ont des club de soutien. C'est la source des luttes incessantes et intestines auxquelles on assiste dans la localité. Elles sont intenses du fait que les rapports au sein du parti ne sont pas suffisamment réglementés.
Conclusion
En Côte d'Ivoire, une crise particulière touche les partis politiques. Les cadres qui militent au sein des partis traditionnels financent des mouvements de soutien, des fans club à leur personne et leurs actions au détriment du parti qui les a fait. Les mouvements de soutien sont mis en avant. Les responsables doivent mettre fin à ces mouvements de soutien pour la construction de véritables partis. Car les partis politiques sont les enfants de la démocratie. Les partis politiques favorisent la démocratie. Les partis ne sont donc pas prêts de mourir en dépit de la concurrence à eux faîte. Au contraire, ils sont débout quand les leaders politiques ont des soucis. Les clubs de soutien au contraire prennent la poudre d'escampette. Même les indépendants aux élections, une fois la victoire acquise finissent par se retrouver au sein des partis. C'est dire qu'il faut laisser le terrain politique aux partis politiques.